Dossier

LA POSTE – L’ asphyxie programmée d’une branche

Le modèle d’organisation et de gestion des emplois à La Poste, qui représente à lui seul un processus alambiqué de développement pour l’entreprise, est en voie de cristalliser de fortes tensions au sein de la Branche Services Courrier Colis. Au fil du temps, les nouvelles organisations et technologies ont renforcé la flexibilité et ont contribué à la remise en cause permanente de l’emploi. Cette quête d’agilité démontre que La Poste est entrée dans une nouvelle phase : plus de productivité pour davantage de profit au détriment de la qualité de travail et de vie des postières et postiers. L’appauvrissement de la qualité de l’emploi engendré par ses techniques laisse une entreprise boiteuse à l’égard des recrutements, les conditions de travail vont de mal en pis et l’absentéisme atteint des taux records. Les gains de productivité sont colossaux et même si l’idée d’évolution de l’entreprise vis-à-vis du marché paraît logique pour la rendre compétitive et préserver l’emploi, la méthode employée pour « organiser » va toujours plus loin et de plus en plus souvent, trop loin.
Au sein de la BSCC, les militants FO Com œuvrent d’arrache-pied pour suivre et agir sur les différentes dossiers consécutifs à des réorganisations.

Chronique des formules auxiliaires

Les annonces de la baisse de trafic Courrier ont commencé à émerger dans les années 2000. Pourtant en 2004, La Poste lançait son plan Cap Qualité Courrier (CQC) visant à refonder son schéma industriel du traitement du courrier, à restructurer ses centres et les emplois. Sur les 3,4 milliards d’euros prévus pour cette évolution drastique, seuls 800 millions étaient consacrées aux personnels (le volet social). La philosophie du projet était de moderniser l’outil de travail pour rester compétitif et a eu pour conséquence d’institutionnaliser les réorganisations dans tous les sites de la BSCC. Jusqu’en 2010, la baisse affichée du volume du courrier s’élevait à 1 % par an. Entre 2000 et 2008, 4 % des tournées disparaissent, le management se durcit en se concentrant essentiellement sur les résultats de façon si brutale que La Poste a été endeuillée d’une vague de suicides, suspendant inévitablement les réorganisations, le temps que Monsieur KASPAR rende son rapport. Un des points portait sur les effectifs :

DESSERRER LES CONTRAINTES SUR LES EFFECTIFS

« Il conviendrait donc, selon nous, de desserrer temporairement les contraintes sur les effectifs, pour permettre une nécessaire respiration pendant la mise au point des nouvelles méthodes de conduite du changement. L’ordre de grandeur de ce « desserrement » pourrait être déterminé par la sanctuarisation du volume d’emplois représenté par les charges syndicales et les absences pour formation. Ce volume pourrait être transformé en embauches sur deux ans, (…) Il va en découler que les organisations seront stabilisées 24 mois. »

Pourtant, les chiffres parlent :
En 2014, il restait 58 000 tournées (source : Cour des comptes) alors qu’en 2000 on en comptait environ 77 000, soit environ - 25 %. Alors si l’on prend comme indicateur qu’une tournée pèse 1 000 plis, entre 2000 et 2014, cette tournée, au regard des baisses de courrier annoncées, aurait perdu 345 plis.
Mais, il s’agit uniquement du courrier car parallèlement, les colis, les objets suivis et le courrier publicitaire adressé vont peu à peu transformer la sacoche du facteur.
D’ailleurs dans son rapport publié en 2020, la Cour des comptes décrit cette transformation :

« Inversement, les volumes des colis connaissent un net essor grâce à la croissance du commerce en ligne, avec 11,0 % de hausse en moyenne par an de 2014 à 2018 (dont + 27,4 % pour les petits paquets internationaux, dits PPI), pour les seuls opérateurs postaux autorisés auprès de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). L’ensemble des branches du groupe a distribué plus de 1,6 milliard de colis dans le monde en 2018, dont près de 600 millions en France, ce qui représente environ la moitié du marché hors PPI. Les volumes distribués en France par le Groupe La Poste se partagent à parts à peu près égales entre d’une part les entreprises sous-traitantes, d’autre part les facteurs ou les postiers livreurs, qui ont donc distribué un quart des colis livrés en France. »

Une grande partie de ce trafic nécessite la présentation au client et un tracking (utilisation du Factéo) donc une nette augmentation du temps de livraison. Or, dans les organisations, ce temps est évalué à 0,30 à 0,75 centièmes de seconde par colis remis en main propre. La Poste décrète qu’on comptabilise 0 seconde s’il y a moins de 2 objets ordinaires à mettre dans la boîte et 2,8 centièmes à partir de 3 objets.
Nous ne rentrerons pas dans le détail très technique du taux de visite qui vient plus que pondérer le nombre d’objets par foyer !

« Par ailleurs, le nombre de boîtes aux lettres de particuliers desservies par les facteurs continue de progresser, en lien avec l’augmentation du nombre de foyers en France : il est ainsi passé de 36,5 millions à 38,1 millions entre 2014 et 2018. En outre, si le volume du courrier traditionnel diminue, les colis, petits paquets internationaux et plis Chronopost distribués par les facteurs sont plus nombreux. Le nombre de Colissimo distribués par les agents de la Branche Services-Courriers-Colis (BSCC) a ainsi progressé de plus de 19 % entre 2014 et 2018, passant de 211 à 251,6 millions. Toutefois, cette progression a été loin de compenser la perte de chiffre d’affaires résultant de la baisse du courrier. »

Il faut également souligner que le mode de consommation des français a changé, ces derniers privilégiant la vente en ligne. Si effectivement, les foyers ne reçoivent quasiment plus de courriers, les colis et objets suivis constituent la grande part de la sacoche du facteur. Cependant, le mode de calcul prôné par les systèmes d’information demeure insensible à ce changement sociétal. Un autre point important : la volonté de l’entreprise est de se tourner vers les services à la personne. Il s’agit là d’une intention louable car notre modèle de production sanctuarisant une personne par secteur apporte de la confiance. Mais c’est sans compter que les réorganisations sont pensées sur le terrain autour de trois axes, qui excluent les prestations en général.

Quels sont ces 3 axes ?

Cœur de métier : le courrier
Impératif économique : productivité anticipée
Cadre légal : distribution et collecte 6 jours sur 7 des envois postaux

Cœur de métier : Le courrier

La distribution du courrier est au centre des réorganisations. Obtenir des chiffres précis du nombre d’objets suivis et de colis est un travail compliqué, alors que l’obtention du nombre de plis est plus naturelle.
Les bordereaux remis aux facteurs lors des diagnostics en sont une preuve. Pourtant, ceci ne constitue plus la majeure partie de leur sacoche.

Source : Cour des comptes d’après données de La Poste. Les volumes pris en compte sont les envois de correspondance, y compris flux outre-mer, plis élections et correspondances import, hors presse abonnée.

Ainsi, les colis ont augmenté d’environ 64 % entre 2015 et 2022 pour atteindre 455 millions en 2022. Même si une partie de la distribution des colis est prise en charge par COLISSIMO, la mojorité l’est par la BSCC. Leur distribution est plus complexe donc plus longue. Nous ne pouvons pas être aussi précis quant au nombre d’objets suivis dans la mesure où aucun chiffre officiel n’est donné. Toutefois, il est reconnu que les objets tracés rencontrent un vrai succès.
Nous savons que La Poste a la capacité de prendre des contrats spécifiques mais malheureusement, les organisations sont si tendues qu’elles ne peuvent être effectuées par les facteurs. Ces prestations devraient être prises en charge par des Facteurs Services Experts (FSE). Pourtant en raison des vacances d’emplois notamment, elles sont exécutées très souvent par l’encadrement voire des intérimaires.
Le Siège, à travers ses discours et ses communications est convaincu que ces services vont se développer. Néanmoins, force est de constater que l’évolution du chiffre d’affaires n’est pas à la hauteur de l’ambition dévoilée. Par ailleurs, le discours reste dissonant pour les facteurs, puisque qu’on appuie encore et toujours au même endroit, sur le cœur de métier qu’est la distribution : les contrats d’embauche et la formation en sont les preuves ! De plus, la prestation n’étant jamais intégrée dans la tournée, elle est ressentie plus comme une contrainte que comme un axe de développement et une pérennisation de son emploi.
Au même titre, l’action commerciale demandée aux facteurs exige du temps, comment est-il intégré ? Mystère !

Impératif économique : Production anticipée

Certes, chacun a bien conscience que la baisse du volume du courrier a un impact grave sur le modèle économique de la branche. La Poste a tenté de faire baisser les coûts fixes, notamment :

  • En travaillant sur l’adressage, point noir des zones rurales. Mais pour cela il faut une volonté politique, ce qui demeure une action longue. Il faut également que le particulier alerte ses expéditeurs de son changement d’adresse, action sur laquelle les facteurs n’ont aucune maîtrise.
  • En travaillant sur les gestes professionnels comme la fusion. Malheureusement, plusieurs points rendent souvent impossible ce geste professionnel. Par exemple, des défauts dans l’ordonnancement de la tournée (TCD) ou encore la « bi QL » fusionnant deux tournées dans une même caissette.

Cadre légal : Distribution et collecte 6 jours sur 7

Si l’on s’en tient aux textes, nous devons élaborer des organisations qui permettent aux français de recevoir les envois postaux du lundi au samedi quelle que soit leur localisation géographique.
Or, FO Com a fait remonter la constante dégradation de ce service concrétisée par :

  • La disparition institutionnalisée des courriers « timbre rouge ».
  • La distribution dégradée du samedi.
  • La mise en place du casier 5 colonnes qui grave dans le marbre des distributions alternées donc non quotidiennes.

De fait, les tournées sont lestées à loisir faisant fi de la réalité du terrain.
Enfin, contrairement à ce qui est affirmé par la gouvernance, le peu d’autonomie laissé aux établissements ne permet pas aux organisations de s’adapter aux réalités du terrain. En effet, les productivités attendues sur les territoires sont prédéterminées par les CAP (à savoir les budgets alloués aux Directeurs d’Établissement). D’ailleurs quel que soit le résultat des diagnostics, l’établissement doit s’adapter à la feuille de route.

En conclusion

Les effectifs ont régressé drastiquement à la BSCC. En 2012, il y avait 154 078 postiers à la BSCC, on en compte désormais 101 166 ; entre 2014 et 2022 nous sommes passés de 58 000 tournées à environ 42 000 en 2022 (soit - 34 %). Pourtant le nombre de kilomètres à parcourir quotidiennement, même avec la rationalisation des itinéraires, n’est pas proportionnel.
Dans son rapport de 2020, la Cour des comptes écrit :

« Les effectifs permanents de facteurs, au nombre de 64 156 équivalents temps plein en 2018, ont diminué de plus de 10 % depuis 2014, étant précisé que les contrats courts ont parallèlement progressé, en passant de 8 % à 13 % de l’effectif total. La masse salariale des facteurs (2,5 Mds€ en 2018) a diminué de 5,1 % sur cette période. »

Il y a des signaux à considérer : La Poste n’arrive plus à embaucher. La précarisation des emplois a un impact considérable sur la qualité que nous devons à nos clients et la mutualisation de nombreuses fonctions à l’opérationnel fait aussi apparaître une baisse constante de l’encadrement.
De nombreux paramètres font barrage à l’embauche de nouveaux agents. Nous avons dénoncé les salaires bien inférieurs à ceux du privé, le système managérial détérioré par des injonctions contradictoires et les pressions constantes pour obtenir des résultats, comme imposer les pauses méridiennes sur tout le territoire puis les interdire ou mettre en place des îlots avec distinction TI/TE puis revenir sur le modèle…

À la liste des incohérences, on peut également ajouter :

  • La non-prise en compte des heures supplémentaires des agents quel que soit leur grade ou leur fonction au prétexte qu’ils ne « savent pas s’organiser » ou que leurs gestes professionnels dégradent la cadence imposée par l’entreprise.
  • Le manque d’évolution professionnelle aggravé par la disparition programmée des Responsables d’Équipe par exemple.
  • La fusion des territoires qui oblige à être groupe B pour diriger un établissement empêchant une évolution douce dans le management.
  • La mutualisation des établissements qui met à distance les CODIR de leurs équipes sur le terrain.

Alors que l’établissement devait être le socle décisionnel, beaucoup de directeurs dénoncent le manque d’autonomie grandissant ; ce qui peut paraître paradoxal quand vous souhaitez développer les équipes autonomes. À priori, on pourrait penser que leur mise en place devrait effectivement permettre l’épanouissement de chacun, mais la philosophie de ce système repose obligatoirement sur le déploiement de ce mode de fonctionnement sur toute l’entreprise. FO Com est convaincue que l’unique but est de faire des économies sur la masse salariale. Sans compter que ce modèle managérial s’oppose diamétralement au schéma tayloriste des organisations dont la base est le chronométrage des activités.

Les premières conséquences que nous avons dénoncées et que nous dénonçons toujours, sont la dégradation du climat social provoquant des conflits, des départs de l’entreprise et plus grave encore, des problèmes de santé mentale et physique. Tout ceci, nous rappelle de mauvais souvenirs, notamment ceux de 2012, qui ont conduit à une crise sociale sans précédente. L’intervention des syndicats conduira La Poste à s’interroger sur son management et ses process organisationnels au travers du rapport Kaspar.

Pour tout cela FO Com dit STOP AUX RÉORGANISATIONS !

Depuis toujours, avec l’appui de FO Com, les postières et les postiers s’organisent aussi.

Après un conflit de 43 jours, les postiers de la PDC de Millau ont fait preuve de détermination contre l’instauration d’une nouvelle organisation. Ce piquet de grève a permis entre autres la création de 3 CDI sur le site de Millau et 1 sur l’établissement de Saint-Affrique, la suppression de l’expérimentation ROP, 10 agents identifiés comme moyen de remplacement, le respect de leur fiche de poste. Cette lutte exemplaire a permis aux postières et postiers impactés par cette réorganisation d’inverser le rapport de force et d’arracher des revendications pour l’amélioration de leur qualité de vie au travail.

À l’appel de FO en 2019, une quarantaine d’agents ont lancé une grève illimitée sur les centres de courrier de Candé (100 % de grévistes) et Segré (50 % de grévistes). Les agents s’opposaient à la nouvelle organisation du temps de travail mise en place, qui a engendré un manque d’effectifs (perte de 5 tournées sur Candé et de 4 tournées sur Segré), une dégradation des conditions de travail et du service rendu aux clients ainsi qu’une souffrance quotidienne au travail. FO a été reçue par la direction de l’établissement et a obtenu la révision de la totalité des tournées sur le site de Candé, du renfort sur la peak period, la prise en charge des agents les plus en difficulté, l’arrivée plus tôt du camion sur les deux sites, et, sur une période transitoire, l’arrivée des bacs courrier pré-triés par tournée.

La Poste obligée de revoir sa copie en Guadeloupe
La méthode d’un projet de réorganisation a mis le feu aux poudres, en déclenchant une grève durant 5 jours. Près de 600 postiers se sont réunis autour du même cahier revendicatif et ont obtenu satisfaction sur 10 thèmes. L’accord avait prévu entre autres la création immédiate d’une centaine de postes en CDI pour une grande majorité et l’arrêt des recrutements en intérim, le maintien des bureaux de poste de plein exercice et l’interruption des réorganisations pendant 6 mois, la formation des postiers pour développer leurs compétences et la fin des pressions managériales. Plusieurs heures de négociations ont été nécessaires pour qu’un protocole de fin de conflit puisse voir le jour.

Égalité professionnelle – Chaque voix doit être entendue

En cette journée internationale des droits des femmes, FO Com rappelle que l’égalité salariale, le temps partiel, la santé au travail, l’articulation entre vie professionnelle et vie privée, la parentalité, les stéréotypes sont des sujets plus que jamais d’actualité.

Pour faire de ce 8 mars, la journée du respect de l’autre, FO Com a appelé chacune et chacun à faire partie de conférences, débats et activités autour du thème de l’égalité femme-homme, organisés partout en France et dans le monde. Plus qu’un symbole, l’égalité constitue une nécessité. Sans le principe d’égalité, il ne saurait y avoir de justice sociale.

Du nouveau pour atteindre l’égalité

Le 7 juin 2023, une directive européenne s’appliquant au secteur privé comme au public a vu le jour. Les États membres ont 3 ans pour la transposer en droit interne. Il s’agit d’une étape déterminante pour parvenir à nos revendications en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Cette directive condamne l’écart persistant de rémunération, apporte des droits individuels et collectifs nouveaux. Pour rappel, la France connaît des écarts bien plus importants que la moyenne européenne. La cause est un manque général de transparence sur les rémunérations, la non-application du principe « à travail égal, salaire égal » et une difficulté d’accès à la justice pour faire valoir ses droits.
La directive remet en question l’index égalité, inopérant après 5 ans d’application, avec la mise en place d’une évaluation paritaire permettant de recenser les différences de rémunération injustifiées. Sans pondération, il s’agit de comparer toute la rémunération et tous les salaires à travail égal ou de valeur égale. Pour tout écart de rémunération injustifié d’au moins 5 % et dont les corrections n’interviendraient pas au bout de six mois, une évaluation plus fine devra être menée afin de le corriger définitivement.
Garantir la dignité et la liberté des travailleurs quel que soit leur sexe est un combat partagé et clamé par FO depuis toujours. Nos objectifs n’ont pas changé : nos employeurs doivent être face à une obligation de résultat plutôt qu’une obligation de moyen. Notre engagement est quotidien pour agir sur des mesures correctives à même de gommer les effets négatifs du temps partiel, de faciliter l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle, de lutter contre les discriminations. La sur-cotisation des employeurs en matière de retraite permettrait notamment aux femmes en temps partiel subi, d’améliorer les conditions de liquidation de leurs droits.
Pour FO Com, cette directive est l’occasion de faire un pas de plus, de poser des appuis solides pour l’égalité professionnelle et salariale. Servant de base à la négociation collective, nous continuerons d’être force d’analyses et de propositions pour enfin atteindre une réelle égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. Pour FO Com, les victoires revendicatives se concrétiseront via la négociation et l’action syndicale quotidienne. Nous persistons à mener cette lutte pour l’égalité professionnelle, pour la défense et l’intérêt de l’ensemble des salariés, puisque la réduction des inégalités bénéficie à tous les travailleurs.

Conditions de travail
ou travail sans conditions ?

Selon une définition couramment employée, les conditions de travail recouvrent les aspects matériels, organisationnels et psychosociaux dans lesquels évolue un salarié au sein de son entreprise. Le travail engendre des effets positifs ou négatifs sur la santé physique et psychique et donc, réorganiser un service ou une activité est censée permettre une amélioration de celui-ci. Qui serait donc mieux placé pour évoquer les conditions de travail que le salarié lui-même ?
À La Poste, même si la reflexion sur le sujet existe vraiment, qu’en est-il de la réalité ? Les actions menées sont-elles efficaces ? Les établissements, bureaux et services ont-ils les moyens d’apporter aux postières et aux postiers des conditions de travail optimales au vu de la productivité demandée malgré de nombreux accords en la matière ? Est-ce que les études d’impacts se tiennent et sont réellement suivies d’effets ? Est-ce que les alertes des acteurs de la prévention sont écoutées et entendues ?
À FO Com, nous avons notre petite idée sur ces questions…
Améliorer les conditions de travail a un coût pour La Poste (moyens, emplois, formation, prévention, …) mais, de mauvaises conditions peuvent coûter beaucoup plus chères aux postiers (burnout, accidents de service, handicap). Tout ceci entraînant fatalement un absentéisme bien au-dessus de la moyenne nationale notamment à la BSCC (Branche Service Courrier Colis).
Une étude annonce qu’on passerait, au cours d’une vie, plus de cent mille heures à travailler, soit plus de douze ans.soit plus de douze ans. Est-ce que ça ne mériterait pas qu’on se penche un peu plus sur la question des conditions de travail ?

Risques au travail : pour une prévention renforcée

Si on se saisit des conditions de travail, il faut en aborder les différents aspects. D’une part, on y décèle les contraintes physiques liées au port de charges lourdes, de l’exposition à des produits chimiques ou au bruit par exemple. D’autre part, et parfois même observé de manière cumulative, on constate que les salariés peuvent être confrontés à des processus générateurs de risques psychosociaux. La non prise en compte des questions de pénibilité et de souffrance au travail a été un des éléments forts de la contestation de la réforme des retraites, ainsi 59% étaient prêts à augmenter leur taux de cotisation pour pouvoir partir plus tôt à la retraite, probablement usés par un monde du travail avec des effets intenables mais prêt à consacrer une part de leur pouvoir d’achat dans la sauvegarde de notre modèle social.
La souffrance au travail a émergé au cours des années 90 dans le débat public, à l’appui des travaux de Christophe Dejours et Yves Clot. De nombreux témoignages ont alors circulé dans la presse. Le point d’orgue fût l’affaire France Télécom et son fameux « Plan NExT ». En cause, une certaine vision du management dont la méthode consistait à dégrader volontairement les conditions de travail pour pousser le personnel à la démission ou à des mutations vers d’autres secteurs. Cette dégradation calculée économiquement des conditions de travail est responsable des 35 suicides entre 2008 et 2009.
Également, certains travailleurs sont réduits à des gestes répétitifs comme faire 150 lits en une matinée ou évoluer au sein d’horaires décalés, d’autres sont confrontés à une perte de sens provoquée par l’intensification des tâches demandées et des objectifs à réaliser, le tout dicté par une quête de profits et de rentes qui sont de plus en plus visibles au sein du monde du travail. Cette situation en devient insupportable pour bon nombre d’actifs lorsqu’ils sont dans une entreprise qui, très distinctement, porte atteinte à leur santé.

BOETH : par ici la sortie !

Lors de son dernier bilan social, La Poste nous annonçait fièrement atteindre 8.66 % de BOETH (Bénéficiaires de l’Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés). La loi datant de 2018 oblige les entreprises de plus de 20 salariés à employer au minimum 6% de cette population. La Poste, donc, est très largement au dessus du quota minimum. Et elle enchaîne les chiffres :

  • 11 millions d’euros consacrés pour garantir une bonne qualité de vie de ce personnel dont plus de la moitié pour le maintien dans l’emploi,
  • 850 postes aménagés en 2021,
  • 370 personnes en situation de handicap seront recrutées dans les trois ans à venir.

Autre chiffre : plus de 500 postiers ont été licenciés pour inaptitude.
Combien d’entre eux étaient valides lors de leur embauche à La Poste !

L’entreprise déclare 14 000 postiers en situation de handicap. Tous, bien évidemment, n’ont pas été embauchés en tant que travailleurs handicapés. Mais alors, comment le sont-ils devenus ? Est-ce que, à tout hasard, les conditions de travail des postières et des postiers ne seraient pas, un tant soit peu, responsables d’une détérioration de leur santé ? La Poste, premier employeur de personnes en situation de handicap en France… Premier fournisseur aussi ?

Les différentes études viennent appuyer la légitimité et l’urgence de la prise en compte de nos revendications en matière de prévention. Les taux d’absentéisme dans les entreprises parlent pour nous. Dans son rapport de mars 2022, l’ANACT (Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail) a relégué la France à la place du mauvais élève de l’Europe en matière d’accidents du travail. La DARES (Direction de l’Animation et de la Recherches des Études et des Statistiques) dresse un bilan d’un autre phénomène n’épargnant aucun secteur d’activités : les risques psychosociaux. Il est constaté que les indicateurs sont loin d’être au vert quand près d’un actif sur 2 déclare devoir se dépêcher, 30 % signalent avoir subi au moins un comportement hostile dans le cadre de leur travail au cours des 12 derniers mois et 25 % disent devoir faire appel à d’autres en cas d’incident.

Addictions et accidents du travail

La Poste comptabilise, au regard de son dernier bilan social, près de 6 500 accidents du travail. Ils sont catégorisés par type ou par gravité, mais on peut difficilement chiffrer ceux qui sont survenus du fait d’un caractère aggravant : l’addiction.
D’ailleurs qu’est-ce que l’addiction ? L’Institut Nord-Américain des drogues (NIDA) nous donne la définition suivante : « L’addiction est une affection cérébrale chronique, récidivante, caractérisée par la recherche et l’usage compulsifs de substances, malgré la connaissance de ses conséquences nocives. »
L’INRS, autre institut, français celui-ci, déclare, par exemple que le risque d’accident grave au travail est multiplié par 2 chez les hommes consommant au moins 4 verres d’alcool par jour, et chez les femmes consommant au moins 2 verres par jour. Il ajoute que conduire sous l’emprise de l’alcool multiplie par 17,8 le risque d’être responsable d’un accident routier mortel.
Mais il n’y a pas que l’alcool en cause. On peut citer également les diverses drogues, certains médicaments, c’est ce qu’on appelle l’addiction à des produits psychoactifs et ils sont de plus en plus nombreux. Il y a aussi, l’addiction comportementale comme celle liée aux jeux vidéo, aux jeux de hasard ou même aux smartphones.
Les pratiques addictives ont des origines mixtes : elles peuvent naître dans le domaine privé tout comme prendre vie dans l’activité professionnelle. Certaines conditions de travail, donc, peuvent favoriser leur survenue, et ce, quelle que soit la branche d’activité. La Poste, fatalement, ne s’exempte pas de ce fléau qui touche des centaines de millions de personnes dans le monde.
Quelles sont donc les actions que La Poste met en place pour contrer ce phénomène grandissant ? Est-ce que les agents sont informés suffisamment sur les risques liés aux pratiques addictives, sur les aides possibles ou sur la règlementation en vigueur ? Ce que nous redoutons, ce sont les sanctions qui seraient données sans forcément anticiper ou comprendre l’addiction dont certains agents souffrent. Bien sûr, il faut rappeler que la consommation d’alcool ou de drogue est interdite et surtout dangereuse au travail et dans la vie privée, pour soi comme pour les autres.
Pour FO Com, il est essentiel d’élaborer une démarche de prévention collective avec des formations, par exemple, afin d’apprendre comment déceler et comment prêter secours à une personne présentant un trouble du comportement. La Poste doit communiquer encore plus et permettre à des associations spécialisées d’intervenir au sein des établissements pour informer, conseiller, accompagner les personnels en difficulté. Elle doit aussi sensibiliser son encadrement et impliquer les acteurs médico-sociaux d’une manière plus pointue. Certes, La Poste prévoit la conception d’un livret à l’attention des Directeurs d’Établissements à propos des addictions (comment les détecter ? par qui ? quel comportement adopter lors du contrôle ? et en cas de contrôle positif ? etc.). Il devrait sortir lors de l’application du RI en septembre 2023. Pour autant, La Poste n’invente rien, elle ne fait que « mettre à jour » son règlement intérieur en conformité avec le Code du travail et son « obligation générale de sécurité ». Ce fameux livret ne devra pas rester sur l’épaisse pile des belles résolutions oubliées.
L’environnement de travail et les conditions dans lesquelles l’agent est placé, on l’a dit plus haut, peuvent générer des troubles addictifs du fait d’un mal-être (pression, stress, harcèlement). Et si on commençait par comprendre cela plutôt que de constater et sanctionner ?

La qualité des emplois actuels, cette « uberisation » basée sur l’offre et la demande constante en réduisant au maximum le coût du travail sans pour autant créer de vrais emplois, précarise les salariés concernés et les expose d’autant plus à des risques. L’employeur doit respecter la réglementation en vigueur. Mais la politique du « pas vu pas pris » est de mise depuis plusieurs années en raison du peu de sanctions encourues par les entreprises fautives. La mise en place de numéros verts ne doit pas les dédouaner de leurs responsabilités. Du coup, cela fait peu d’investissement de la part des employeurs pour prévenir les risques au travail, absorbés par l’indéfectible question « mon entreprise pourra-t-elle être compétitive et rentable demain ? ». Concentrons-nous sur notre avenir et notre viabilité, faisons des business plans sur 5 ans, et vogue la galère pour ceux qui seront impactés négativement !

Ergonomie : une action qui tombe à PIC ! Mais…

La Nouvelle Gamme Courrier déclenche une véritable mutation en ce qui concerne les conditions de travail dans les PIC (Plateformes Industrielles de Courrier) notamment au niveau des régimes et horaires de travail.
L’accord « d’accompagnement des activités traitement du courrier » a été négocié et signé par FO en février 2023 afin de garantir un environnement de travail le mieux adapté possible.
Dans cet accord, il y a une nouveauté : la nomination d’un ergonome. Bon, un ergonome pour toute la DEXCIL, c’est-à-dire 30 PIC qui regroupent près de 12 000 postières et postiers, cela ne ferait-il pas un petit peu léger ? Loin de dénigrer cette initiative que nous considérons évidemment comme essentielle en termes de prévention, nous nous interrogeons toutefois sur l’efficacité du nombre. Le temps que ce spécialiste des conditions de travail se déplace sur chaque site, analyse les diverses situations, fasse des propositions d’amélioration et que celles-ci se concrétisent… Enfin, vous voyez ce qu’on veut dire. La BSCC va nous dire : « Oui, mais dans l’accord, il est prévu un préventeur par site qui sera le relais de l’ergonome ». Ok ! Mais un préventeur n’est pas un ergonome, c’est-à-dire un analyste faisant le lien entre le postier et les effets de l’activité sur sa santé tant physique que mentale et tout ceci, afin d’évaluer l’écart entre le travail prescrit et le travail réel.
C’est pourquoi FO Com revendique la présence d’un ergonome sur chaque site afin d’être bien plus réactif et donc, de concrétiser collectivement les pistes d’amélioration suggérées avant qu’il ne soit trop tard pour le personnel impacté.

Quant à la réparation, les réformes successives ont éloigné les travailleurs du système judiciaire auxquels ils pouvaient prétendre. Certaines affaires courent dans le temps ou sont expédiées avec une indemnisation frôlant le ridicule. Il faut aussi mentionner celles et ceux qui sont licenciés pour inaptitude, leur corps abîmé par le travail et indemnisés insuffisamment. Ces femmes et hommes ont pour la plupart du mal à se réinsérer dans le monde du travail. Puis, on ne peut que constater avec effroi le détricotage de notre Sécurité sociale depuis qu’elle a été créée et où les gouvernements successifs, plus belliqueux les uns que les autres, n’ont plus de gêne pour piocher un million par-ci, 10 milliards par-là. Comment ne pas croire qu’un jour, les indemnisations en montant ne seront pas révisées ? N’oublions pas qu’en paysage de fond, nous avons, en France, un corps médical dans nos territoires affecté par une pénurie de personnel, des coupes budgétaires drastiques, entraînant de plus en plus de fermetures de services et créant un appauvrissement de notre système de soin alors que nous sommes dans une époque où nous devrions lui redonner un tout autre souffle. Mais comment garantir cette santé ?

Médecins du travail à La Poste,
tous les postes doivent être comblés

Si le travail c’est la santé, alors à quoi sert la médecine du travail ? (Pierre DAC)
Lors d’une réunion annuelle au Siège, nous avons appris qu’en complément ou en cas d’absence de praticiens. La Poste faisait appel à des médecins du travail des services de santé au travail interentreprises avec une convention. Cela concerne les 8 secteurs géographiques : Lozère, Essonne, Seine-St-Denis, Seine-et-Marne Sud, Guadeloupe, Guyane, Mayotte, St-Pierre-et-Miquelon. Certes, le manque de médecins n’est pas une situation postalo-postale mais un phénomène national. Toutefois, FO Com souhaite attirer l’attention sur les conséquences de ce manque qui pourrait s’accentuer : Est-ce que les postières et les postiers donneront tous les éléments au médecin qu’ils ne rencontrent, au mieux, qu’une fois tous les trois ans ? Est-ce que les médecins ont les moyens d’analyser sereinement une situation afin de prévenir suffisamment tôt l’apparition de risques et construire une relation de confiance ? Que se passe-t-il en cas de carence de médecin lors d’une visite de reprise de l’agent ? Et toutes ces interrogations ne feront que s’amplifier car la moyenne d’âge des médecins du travail dépasse les 55 ans.
De plus, à la suite des évolutions réglementaires en médecine du travail, le rôle de l’infirmier en santé au travail a évolué : il aura désormais des missions définies par le code de la santé publique et des missions confiées par le médecin du travail, sous son autorité et dans le cadre de protocoles écrits par exemple, effectuer les VIP (Visites d’Information et de Prévention).
FO Com exige que tout soit mis en œuvre pour un comblement de tous les postes vacants et revendique toujours que les services de prévention et de santé soient justement reconnus.

Des lois plus scélérates les unes que les autres…

Force Ouvrière dénonce depuis plusieurs années les différentes volontés de « simplifier » le système de prévention des risques professionnels, motivées réellement par l’appauvrissement des moyens pour les organisations syndicales, et d’aborder ce sujet uniquement sous l’angle de « coûts ».
FO n’a cessé de dénoncer l’application de la Loi El Komhri et des ordonnances Macron liées au travail, restreignant davantage la disponibilité qu’ont les syndicats vis-à-vis des travailleurs, qui est une attaque ciblée à leur droit d’expression et à leur représentation. Dans ce contexte, un syndicat est maintenant considéré comme un caillou dans la chaussure pour l’entreprise alors que son objectif est de militer pour un environnement de travail plus sûr et plus sain. D’ailleurs, la disparition des CHSCT n’augure rien de bon pour le monde du travail, puisque ce changement a eu seulement comme résultat de réduire les heures de dialogue social autour de ce sujet, emportant également une force syndicale en nombre permettant de faire rempart à une centralisation excessive alors que la santé et la sécurité au travail est une affaire de proximité.
FO n’a jamais perdu une occasion de mettre la prévention des risques au cœur du dialogue social dans nos entreprises. Depuis toujours, les manches sont relevées de notre côté pour faire avancer ce sujet plus que central. Non pas à cause des effets du marché du travail sur notre environnement, mais depuis que le monde du travail est devenu de plus en plus oppressant et exigeant, injuste et partial. Ce droit à un environnement de travail sûr et sain, classé en 2022 comme fondamental par l’OIT, doit être saisi à toutes les niveaux. On comptait jusqu’à présent quatre droits fondamentaux liés au travail : la liberté d’association et la reconnaissance effective du droit de négociation collective, l’élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire, l’abolition effective du travail des enfants et l’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession.
FO Com continuera de négocier des accords s’appuyant sur les différentes conventions de l’OIT, ratifiées ou non par la France. Cette dynamique est complémentaire à la loi sur le devoir de vigilance, loi à la croisée des chemins de nos enjeux actuels puisque l’objectif est d’éliminer toute atteinte initiée par des donneurs d’ordre aux droits humains et au respect de notre environnement. Nous resterons attentifs au quotidien et exigerons les bonnes pratiques pour éviter la propagation des facteurs de risques et mettre en place une prévention renforcée basée sur le dialogue et la proximité avec les travailleurs.

Qu’est-ce que le devoir de vigilance ?

Après l’effondrement du Rana Plaza qui a causé plus d’un millier de morts, le gouvernement français a souhaité responsabiliser les entreprises multinationales sur les violations des droits de l’Homme, la santé et la sécurité, ainsi que de l’environnement dans leurs chaînes d’approvisionnement. La loi reconnaît ainsi le pouvoir que les entreprises multinationales exercent sur leurs fournisseurs, leurs sous-traitants et leurs filiales en leur imposant de de s’engager pour que leurs partenaires commerciaux respectent un socle minimum de droits. La France a adopté une première loi le 27 mars 2017. L’Allemagne a suivi avec une loi en juillet 2021 et la Commission Européenne a initié une directive publiée en 2022.
Cet objectif du devoir de vigilance doit être réalisé par le biais de deux mécanismes : un mécanisme de prévention adossé à une possibilité de recours pour les victimes de violations dans la chaîne d’approvisionnement. Comment procède-t-on ? Une cartographie des risques doit être réalisée comprenant liberté syndicale et droit à la négociation collective par exemple, ainsi que les droits sociaux fondamentaux. Différentes procédures (évaluation, suivi, mécanisme d’alerte, consultation des organisations syndicales) doivent être mises en place.

La préservation de bonnes conditions de travail un rôle important du syndicat

La proximité de Force Ouvrière auprès de nos adhérents et l’ensemble des agents nous permet de constater si les conditions de travail se dégradent. Le lien humain, les nombreux échanges et la confiance que nous apportons libèrent la parole et permettent de recueillir de nombreux témoignages.
Les réorganisations incessantes tiennent de moins en moins compte de l’impact subi par les postiers et accentuent la dégradation des conditions de travail. Entre études d’impact non réalisées ou non suivies dans le temps, non prise en compte du vieillissement des agents et charge de travail physique et mentale plus importante, les agents ne s’y retrouvent plus.
Ceci entraîne des conséquences désastreuses : un manque de motivation réelle et une perte de confiance en l’entreprise. Et quand la coupe est pleine, l’arrêt maladie résonne comme une échappatoire. Et c’est l’engrenage avec un absentéisme qui explose aujourd’hui à La Poste.
Le syndicat agit à plusieurs niveaux. D’abord au travers des Comités d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail. Les Commissions Nationales de Santé Sécurité au Travail sont aussi un levier puisque les sujets évoqués impacteront les conditions de travail. Et enfin, le syndicat a un rôle capital sur le terrain, dans le cadre des diverses instances locales ou nationales ou dans une démarche d’alerte.
Au-delà de l’augmentation des contraintes physiques que nous constatons régulièrement et sur lesquelles nous arrivons à trouver des solutions, se développe une dégradation de la santé mentale avec des risques psychosociaux et des burn out de plus en plus fréquents. Il ne faut jamais minimiser l’incidence que peuvent avoir les remarques, la pression, les objectifs sur l’état psychologique d’un postier. Travailler ne doit pas rendre inapte, encore moins exclure. Il est anormal également de se rendre sur son lieu de travail avec « la boule au ventre ».
Des alarmes comme l’explosion de l’absentéisme, la fuite de l’entreprise à travers les démissions et les ruptures conventionnelles plus nombreuses ou encore la peine à recruter doivent faire réagir l’entreprise malgré la difficulté de plus en plus importante de se faire entendre. C’est pourquoi, à FO Com, nous poursuivons sans relâche nos actions quotidiennes pour l’amélioration des conditions de travail.

Focus sur les filiales des activités postales du groupe La poste

« Je suis responsable des filiales depuis février 2021 avec l’aide de Noëlla Le Bourvellec, mon rôle est d’impulser les valeurs de FO COM auprès de nos élus CSE, délégués et représentants syndicaux.
Je les accompagne au quotidien dans leur développement et les aide à résoudre leurs problématiques.
À leur côté, je suis également présent dans les Comités de Groupe pour représenter notre Fédération.
Je participe également au dialogue social au sein de leurs entreprises respectives.
FO COM s’attache à être présente partout dans les Filiales de la poste groupe indépendamment de la taille de l’entreprise, du métier exercé et du statut des salariés. Les camarades doivent être soutenus, défendus et reconnus comme des postiers à part entière avec la même protection et la même considération au sein du Groupe. »

Pierre Marquier

VIAPOST

Peux-tu nous présenter VIAPOST : la société VIAPOST est une filiale 100 % du Groupe La Poste de 2 300 salariés. Elle est composée de quatre autres sociétés de secteurs d’activités différents : VIAPOST Industrie : Avec la société NEOLOG qui se concentre essentiellement sur le tri de PPI, colis et la société STP qui est principalement du tri courrier et de la manutention, VIAPOST Maintenance : Maintenance en secteur industriel France et Belgique, VIAPOST Transport Management : Gestion des transports avec La Poste et autres.

Quel est l’encrage syndical de FO Com à l’intérieur de VIAPOST en 2023 ?
FO Com est la première organisation syndicale dans VIAPOST depuis les dernières élections. Je suis Délégué central, élu au CSE de NEOLOG et également secrétaire du Comité de Groupe VIAPOST et membre du CDSG. Nous avons des représentants FO Com dans les différentes sociétés du Groupe VIAPOST et des contacts permanents avec les agents sur tous les sites.

Quelle sont les derniers éléments majeurs pour les agents de NEOLOG et VIAPOST dans son ensemble ?
Plusieurs accords ont été négociés et signés fin 2022 et début 2023 :

  • Un accord collectif de la mutuelle sur les garanties incapacité, invalidité et décès et remboursement des frais de santé pour VIAPOST.
  • Deux accords collectifs portant sur la gestion des emplois et de parcours professionnels GEPP et sur la rupture conventionnelle collective RCC au sein de NEOLOG. Les activités en décroissance et la nouvelle gamme courrier de la branche courrier de La Poste, obligent NEOLOG à se réorganiser. Ces ruptures conventionnelles et les mesures attenantes ne sont que sur la base du volontariat et permettent aux collègues qui le souhaitent d’appréhender les fermetures de site annoncées d’une autre façon.
  • La Négociation Annuelle Obligatoire sur les salaires (NAO 2023) à NEOLOG signée en janvier 2023.

Nos objectifs sont d’être présents au quotidien à l’écoute de nos collègues, répondre à leurs problématiques, porter leurs revendications au CSE, améliorer leur salaire, santé et protection au travers d’accord mieux disant, maintenir le lien avec la direction avec un dialogue social serein, humain et de qualité.

Laurent Duciel

CHRONOPOST

Si en 2022 les effets de l’inflation ont été contenus grâce à des NAO correctes en deux parties, c’est aussi parce que les résultats financiers sont là, grâce au transport de colis en B to B et B to C (e-commerce). À Chronopost, la direction utilise l’intérim et la sous-traitance comme variables pour assurer ses objectifs de rentabilité. Ceux qui restent travaillent dans des conditions dégradées au risque de ne jamais pouvoir devenir des séniors au travail, et encore moins en bonne santé. Les équipes FO Com sont présentes dans plus de trente villes, avec des « représentants de proximité » désignés par les membres du CSE. Si l’entreprise se déclare inclusive, RSE, et que FO Com a signé un accord Handicap, tout est soumis aux critères financiers et il n’est pas rare que la carrière des ouvriers se finisse en inaptitude. Les accidents du travail ne peuvent pas être satisfaisants, notamment en raison de la manutention de charges lourdes, dont les glacières géantes qui assurent la livraison de produits frais (alimentaire et santé).

L’équipe Chronopost de FO Com

DPD FRANCE

Au niveau des négociations, nous sommes en pleines NAO, après encore une année record en termes de bénéfices pour l’entreprise, nous avons également l’accord d’intéressement à renégocier au printemps. Nous avons fait notre assemblée générale en octobre, en présence de nombreux militants de notre syndicat, le conseil syndical se réunit régulièrement, afin d’aider les délégués syndicaux dans leurs tâches.

FO Com est à 49 % de représentativité chez DPD FRANCE depuis les élections de juin 2022, et nous avons 12 élus sur un total de 25 au CSE, et, ce, dans les trois collèges. Depuis 2010, nous sommes toujours au-dessus des 40 % de représentativité.

Walter Stephanello

DOCAPOSTE

Docaposte, est une société filiale de la branche numérique du Groupe La Poste qui propose une gamme d’offres pour gérer les échanges professionnels de documents. Elle détient environ 30 filiales et comprend un effectif de plus de 6 000 personnes au sein de son groupe, offrant des services en ingénierie informatique et traitement de documents : numérisation de documents pour archivage électronique ou diffusion électronique, édition et mise sous pli (éditique industrielle), archivage électronique, vidéo-codage, vote électronique… Docaposte intervient dans les secteurs de la banque/finance, de l’assurance, de la santé, du secteur public ainsi que d’autres secteurs d’activité.

FO Com est présente au sein de plusieurs entreprises du Groupe avec des élus aux CSE et des représentants syndicaux toujours force de propositions qui œuvrent au quotidien pour les intérêts des salariés et leurs conditions de travail. Notre organisation syndicale est aussi activement présente au comité de groupe et intervient régulièrement dans cette instance pour remonter les problématiques rencontrées.

Julien REMOND, délégué syndical central à Docaposte BPO IS, élu titulaire au CSE, membre de la CSSCT, membre au conseil d’administration, représentant syndical au comité de groupe Docaposte, membre de la CDSG (comité de développement stratégique et social groupe) à La Poste et conseillé prud’homal à Évry ainsi que les représentants FO Com reste à votre disposition pour vous conseiller et vous accompagner.

L’équipe Docaposte de FO Com

NOUVELLE ATTITUDE

Créée en 2008, Nouvelle Attitude est une entreprise de l’Économie Sociale et Solidaire conventionnée d’ « insertion professionnelle », et acteur référent en France du tri et de la valorisation des papiers et cartons. Filiale du Groupe La Poste, Nouvelle Attitude étend aujourd’hui son activité pour alimenter de nouvelles filières de recyclage et de nouveaux réseaux de réparation et de réutilisation(Reconditionnement vélo facteur…)

Au sein de ses 6 plateformes ( Buc (78), Mions (69), Joué les Tours (37), Vitrolles (13), Saint-Étienne-du-Rouvray (76) et Portet-Sur-Garonne (31) ) des hommes et des femmes jusqu’alors à l’écart du monde du travail (chômeurs de longue durée, jeunes sans expérience, personnes sans ressources…), bénéficient d’un accompagnement individualisé, afin d’assurer à chacun un retour vers un emploi stable ou une formation qualifiante.

Notre rôle en tant que délégué syndical FO (majoritaire aux dernières élections) est de veiller à ce que personne ne soit oublier dans cette immense ambition qui est celle d’une entreprise qui rêve de valoriser l’homme et de valoriser la matière.

Amadou Sarr & Louis Ehounoux

LA POSTE IMMOBILIER

La Poste Immobilier (depuis janvier 2022) est constituée de la filiale Poste Immo (créée en 2005) et de SIMMO (Solution Immobilier – La Poste).
La Poste Immobilier a développé un savoir-faire dans le domaine de la construction et de la gestion d’un patrimoine diversifié. Réparti sur l’ensemble du territoire, le parc immobilier du Groupe La Poste est l’un des plus grands de France avec 9 745 immeubles, représentant 6,1 millions de mètres carrés (chiffres 2021). Il se compose ainsi de vastes plateformes industrielles, de petites et moyennes surfaces commerciales et de locaux tertiaires.

À ce jour, il y a 737 collaborateurs dont 499 Poste Immo et 238 postiers. En raison de la conjoncture au sein de La Poste Immobilier qui entraîne une baisse de l’activité, il y a une réelle problématique de réduction des effectifs et de recours à la sous-traitance.
Présente à SIMMO, FOCom jouit d’une bonne représentation au sein de la Poste Immobilier

Delphine CHARBONNIER, déléguée syndicale à La Poste Immobilier, est élue titulaire à la commission consultative paritaire locale et au Comité Technique, membre du CHSCT et représente FOCom dans les plénières sur tout le territoire, tout en travaillant comme assistante et maîtresse d’ouvrage à Tours. Font également partis de l’équipe FO Com : Cédric ONOO, élu suppléant à la commission consultative paritaire locale et Inspecteur technique à Bordeaux, Jean-Philippe HELOIR Inspecteur technique à Tours et Philippe LOIRAT, élu titulaire à la commission administrative et paritaire locale Inspecteur technique à Nantes.

L’équipe La Poste immobilier de FO Com

Du côté du Conseil Administration du Groupe La Poste

Au travers du plan stratégique « La Poste 2030 engagée pour vous », le Groupe La Poste a continué de diversifier ses activités. Dans le secteur de la logistique, Geopost*, filiale 100 % du Groupe La Poste, cherche à se développer de plus en plus à l’international, où elle réalise plus de 40 % de son chiffre d’affaires. Notons que 87 % de la croissance du marché mondial du colis se fera hors d’Europe dans les 5 prochaines années. Asendia (400 M€ de chiffre d’affaires) spécialiste du e-commerce frontalier a rejoint le groupe Geopost en 2021.

Geopost est ainsi devenu leader en Europe sur le marché de livraison de colis, avec plus de 54 000 collaborateurs.
Dans le domaine de la santé, la BU Silver économie et Santé marque l’ambition de La Poste à vouloir développer ses activités dans les domaines des services à la personne, de la santé à domicile, de l’accompagnement du parcours de santé et du maintien de l’autonomie.

Le développement de ces nouvelles activités passe par l’acquisition de certaines sociétés comme Maincare, leader de l’accompagnement de la transformation numérique des hôpitaux en France. Cela permet de renforcer La Poste dans l’édition de logiciels santé et de devenir hébergeur de données de santé. Cela passe également par le développement d’Asten Santé (prestataire de santé à domicile dont La Poste a acquis la majorité en 2017) avec notamment :

  • L’accroissement de la couverture du territoire et la consolidation de ses positions sur le marché français avec une politique d’acquisition (une quinzaine de petites opérations de consolidation régionale ont été réalisées en deux ans dans la prestation de santé à domicile).
  • Le développement de nouveaux services de prise en charge à domicile de pathologies à enjeux (oncologie, diabète, nutrition).
  • L’intégration des facteurs aux politiques de santé publique (livraison de médicaments, livraison de repas, installations d’objets connectés, service à la personne…).
  • Le déploiement de ces activités santé en Europe.

Au conseil d’administration, le débat sur les filiales est très important, nous voyons que le Groupe La Poste se développe de plus en plus à l’international avec une ambition de devenir un acteur mondial de logistique décarbonée. Il est indispensable de faire les bons choix avec les bonnes stratégies. En 2022, le Groupe a dû se séparer de DPD Russie au vu des évènements géopolitiques.
Dans le champ de la santé, avec l’application La Poste eSanté, Digiposte Ma Santé, la prise de participation dans Asten et le rachat de Maincare, La Poste est devenue un interlocuteur légitime de ce secteur en pleine croissance.
Avec l’ensemble de ses filiales de secteurs stratégiques tels que la logistique et la santé, La Poste continue de créer des emplois et d’en maintenir notamment dans le secteur courrier/colis.

Isabelle Fleurence

Au conseil d’administration, nous sommes sollicités sur toutes les acquisitions supérieures à 100 M€. En 2022 :

  • Acquisition de 45 % de SPEEDY, entreprise de logistique qui permet à DPD* de devenir n°2 en Bulgarie et n°5 en Roumanie.
  • Acquisition également de 100 % de CitySprint, société spécialisée dans le transport express des livraisons le jour même au Royaume-Uni. Société en fort développement notamment dans le e-commerce.
  • Acquisition de 100 % des parts d’ESW, une étape importante de la stratégie d’Asendia pour devenir un spécialiste du e-commerce transfrontière.
  • Prise de participation à 28 % du capital de Aramex, ce qui permet d’avoir une présence sur des marchés porteurs du Moyen-Orient et d’accroître sa présence multidomestique.
  • Achat également de « C chez vous » qui appartenait au groupe Casino, et qui va permettre la livraison de produit supérieur à 30 kilos.
  • Acquisition de SCALEFAST à 100 %, fournisseur de solutions e-commerce globales basée aux USA.
  • Acquisition de Cool Runnings à 100 %, société de transport de produits frais et à température contrôlée au Pays-Bas.
  • Acquisition de Pourdebon à 100 %, place de marché alimentaire dont Geopost était déjà actionnaire depuis 2016.

FO Com engagée à l’international

Le Groupe La Poste représente 245 000 agents présents dans 63 pays et sur 5 continents, 2,1 milliards de colis en 2021 sous la marque DPDgroup, plus de 18 milliards d’objets (lettres, imprimés publicitaires, colis) distribués à travers le monde soit 41 % de ses 34,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Pour cela, elle a fait le choix depuis des années d’acquérir des entreprises (filiales) afin d’être par exemple le premier en Europe dans le colis-express avec plus de 1 400 hubs et dépôts dans le monde. C’est le cas de la holding Geopost/DPD créée en 1999 qui regroupe après fusion, acquisition ou partenariat, des entreprises comme SEUR en Espagne, Masterlink et Siodemka en Pologne, BRT en Italie, JadLog au Brésil, DPD Laser en Afrique du Sud, Ninja Van en Asie du Sud-Est, etc.

Pour FO Com, première organisation syndicale dans les filiales, La Poste qui ambitionne d’être la première entreprise dans le colis express ou d’être dans le top 10 mondial des opérateurs de services au e-commerce et leader européen de la logistique urbaine ne peut s’exonérer entre autres du respect d’un certain nombre de droits humains. Signataire avec d’autres organisations françaises d’un accord mondial au sein de Geopost depuis 2017, FO Com a participé récemment à l’ouverture d’une négociation sur un avenant à cet accord.

Pourquoi un avenant ?
Parce que de nouveaux textes en France et au niveau européen exigent désormais des entreprises concernées une vigilance sur l’activité de leur sphère d’influence (sous-traitants, fournisseurs, filiales, etc.) concernant le respect de certains droits essentiels. Les sociétés concernées sont qualifiées de « sociétés dominantes » en raison du pouvoir qu’elles détiennent sur d’autres acteurs économiques.
FO Com plaide pour une identification des activités à risque concernant « les droits de l’homme, l’environnement et la bonne gouvernance », la mise en place d’une « stratégie de vigilance » en y associant les « parties prenantes » et l’assurance de la publicité de cette stratégie. La Poste est donc tenue de prendre « toutes les mesures de précaution requises […] pour éviter le préjudice » subi en raison de manquements aux droits humains/environnementaux, soit une obligation de moyens. Le lien avec le droit français est évident. La Poste doit établir, publier et mettre en œuvre un plan de vigilance comprenant « les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement » (C. com., art. L. 225-102-4).

Il est désormais indispensable d’aboutir partout à des accords mondiaux car ils permettent notamment d’élever les standards et de faire respecter les droits des travailleurs dans l’ensemble de leurs opérations mondiales. C’est notamment le rôle actif de FO dans les instances européennes et internationales au sein de UNI Global Union ou de la Confédération Européenne des Syndicats.
Ces dernières années, les accords mondiaux ont élargi leur champ d’application pour inclure des questions telles que le congé de maternité, le droit à la déconnexion, les politiques visant à mettre fin à la discrimination et à la violence sexiste, le travail à distance, ainsi que la santé et la sécurité.

Le mot de la Secrétaire Générale

La Poste Groupe (telle est sa nouvelle appellation) s’éloigne de plus en plus de sa traditionnelle distribution de courrier et de son emblématique bureau de Poste. Elle essaie ainsi de s’adapter à nos changements de consommation et à l’apparition de nouveaux besoins, recherchant de nouvelles activités. C’est la raison pour laquelle elle acquièrt ou crée des filiales (tant au sein des activités postales, notre dossier, que du côté bancaire). Cette stratégie s’accompagne d’un développement sans précédent à l’international : c’est aujourd’hui 40 % de son chiffre d’affaires.
Face à cette transformation, le défi syndical est immense. Ce ne sont plus LES postiers, mais DES postiers, tellement les emplois, conditions de travail, rémunérations sont disparates. Ceci nous oblige à des revendications en harmonie et à la hauteur des attentes, parfois différentes, tout en gardant, bien évidemment, toutes nos valeurs. Pour ce faire, nous avons, au niveau fédéral, bâti une organisation militante qui répond à la fois au combat syndical avec l’élaboration de cahiers revendicatifs avec les délégués syndicaux, aux exigences des « douloureuses » institutions représentatives de personnel avec le soutien aux élus des CSE, et à l’indispensable lien entre maison-mère et filiales avec des militants fédéraux qui assurent un « transverse » essentiel à une cohérence syndicale et une cohésion humaine. Et ça marche ! Parce que chacun a compris les enjeux et la nécessité du travail collectif, le développement est au rendez-vous, tant en termes d’adhésions que de créations de syndicats. Chapeau bas à tous !

Christine Besseyre

Implantations FO Com

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Changement climatique La prochaine frontière du monde du travail

Les discussions liées à nos impacts environnementaux prennent davantage de place dans notre société et sont l’objet d’une campagne acharnée depuis quelques années, où experts, scientifiques, associations et politiques jouent au jeu du chat et de la souris. Toute cette industrie qui a mis 50 ans à émerger, toutes ces barrières psychologiques, ces adhérences de consommation, en bref, tous ces modèles de croissance sont-ils immuables ? Sans sobriété dans les pratiques de consommation, il est clair que l’objectif sera péniblement atteignable.
Au risque de créer une nouvelle bulle financière dès lors que nous affrontons une crise, il serait de bon ton d’arrêter de réduire la transition écologique à de simples leviers de croissance et d’affaires de gros sous !
Pour Force Ouvrière, cette équation ne peut se dissocier des politiques économiques et sociales. C’est pourquoi notre organisation s’est saisie de ce dossier.

Force Ouvrière et la question de l’environnement : une longue histoire et des revendications claires.

Dès 1974, FO affirmait dans sa résolution de congrès : « La défense de l’environnement doit aussi faire l’objet d’une action syndicale menée avec détermination » précisant que « une politique de l’environnement ne doit pas être déterminée par opposition à l’expansion économique, mais exige le dégagement immédiat des moyens nécessaires à une amélioration réelle des conditions et du cadre de vie ». La résolution sociale confortait ces propos en appelant à agir par une « action syndicale accrue pour la lutte contre la pollution et la protection de l’environnement ».
Au congrès de 1977, une résolution spécifique sur l’environnement insistait sur deux impératifs : nécessité et obligation de concilier environnement et croissance, exigence d’une action réglementaire de niveaux européen et mondial. Ainsi, pour FO, il est impossible de traiter la question écologique sans se préoccuper de la condition des travailleurs ni établir des normes et objectifs clairs et incontournables au plan international.
En 1980, sous l’égide de son Secrétaire Général, André Bergeron, FO crée la Commission Confédérale Environnement, avant de s’inscrire dans les démarches syndicales coordonnées par la CISL (aujourd’hui CSI) et porter la revendication de « garantir des mesures de transition fondées sur la justice sociale et sur l’investissement dans des politiques industrielles et environnementales créatrices d’emplois décents tels que définis par l’OIT ».

Dans la continuité de ces actions, le Comité Confédéral National de septembre 2019 décide la création d’une Conférence Syndicale Permanente (CSP), composée de militants de différentes fédérations, dont FO Com, et des unions départementales. Au-delà d’identifier des axes d’analyses et de dégager des revendications, il s’agit également de ne pas laisser ces questions aux seules associations et ONG.
Lors de sa première réunion, la conférence a défini le cadre dans lequel doit s’inscrire FO pour agir efficacement sur le plan social. Pour les militants, les enjeux en termes d’emplois sont tels – la question environnementale touchant de nombreux secteurs – qu’il est primordial d’anticiper afin d’assurer l’avenir de milliers de salariés. Invité à cette première réunion, Jean Jouzel, climatologue et directeur de recherche au CEA, a évalué entre 600 000 et 900 000 les emplois qui peuvent être créés, tous secteurs confondus.

Bien que très réservée sur la légitimité démocratique de la convention citoyenne pour le climat (CCC), mise en place par le gouvernement, la CSP s’est intéressée à ses travaux en invitant son rapporteur, Julien Blanchet. Les réponses apportées sur les impacts sociaux ainsi que sur la période de transition, entre aujourd’hui et 2050, date à laquelle la France devrait être neutre en carbone, laissent à penser que les risques sociaux ne sont pas suffisamment pris en compte. Constante dans sa revendication, FO lui a rappelé que ce changement de paradigme ne doit pas être réalisé sans, en parallèle, « assurer un travail décent, au sens de l’OIT, aux travailleurs ».

En pleine crise sanitaire (mai 2020), la CSP a amené les militants à réfléchir à ses conséquences et au marasme économique et social qu’elle a engendré. Quelles politiques et mesures prises au titre du climat et de l’environnement ? Plus largement, quelle place à la justice sociale ?
Tout au long de l’année 2021 et jusqu’à aujourd’hui, la CSP continue ses travaux en portant ses revendications en la matière, notamment au travers de l’analyse des 149 propositions de la convention citoyenne pour le climat. Le Président de la République a, d’ores et déjà, écarté deux d’entre elles, pourtant ô combien majeures pour FO. Il s’agit d’une part, de taxer à hauteur de 4 % les dividendes et, d’autre part d’établir un moratoire sur le CETA (accord de libre-échange entre l’UE et le Canada). Concernant le premier rejet, il est important de rappeler que, dès 2018, la Confédération a dénoncé le recul que représente la suppression de la taxation des 3 % sur les dividendes. Quant au CETA, FO a demandé la suspension de l’application provisoire de ce traité qui va avoir des impacts négatifs sur l’emploi, plus particulièrement dans des filières, déjà fragilisées, de la production agricole. D’autres mesures dont la convention refuse d’appréhender les conséquences désastreuses ne peuvent qu’accroître le phénomène. La conclusion de la CCC est, d’ailleurs, on ne peut plus claire : « Nous, les 150 citoyennes et citoyens sommes conscients que les mesures que nous préconisons peuvent être difficiles à comprendre et parfois à accepter pour tous ceux qui verront leur métier disparaître et devront se réorienter. » Non seulement cette entité n’a pas la légitimité pour représenter l’intérêt général mais, en plus, elle s’exonère d’assumer les conséquences de ses propositions !

Même cas de figure en ce qui concerne le plan climat européen. Face aux mesures de la commission européenne, visant à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, FO a exprimé ses inquiétudes sur les risques qu’elles font peser sur le pouvoir d’achat des ménages comme sur l’emploi. Nous avons insisté sur le rôle incontournable du dialogue social et de la négociation collective. Si la lutte contre le réchauffement climatique est essentielle, elle doit également, au niveau européen, s’accompagner de mesures sociales justes.

Pour faire connaître les positions de notre organisation en matière de transition écologique, la Confédération a publié un cahier de revendications intitulé « Climat et environnement : un enjeu social ! ». Ce livret reprend les thèmes inscrits dans la loi « climat et résilience », loi issue des 149 propositions de la convention citoyenne et publiée le 24 août 2021 : « consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger et se nourrir ».

Ce livret est, aujourd’hui, d’autant plus indispensable que dans les entreprises de plus de 50 salariés, la loi intègre la question de la transition écologique dans les attributions du CSE. Mais, au-delà des élus du CSE, c’est bien nous tous, militants et citoyens concernés, qui devons être informés au mieux des risques et enjeux afférents à ce domaine et porter nos revendications. Certes, ce sujet est crucial pour notre avenir climatique mais il revêt aussi une dimension sociale et démocratique.

La croissance verte dans un avenir mondialisé entre réalités et ambitions d’intégration

Les enjeux climatiques sont tels que les négociations autour de potentielles mesures sont extrêmement complexes puisque liées à la géopolitique. La course à la croissance perpétuelle pousse certaines puissances mondiales à l’inertie afin de réduire notre impact sur l’environnement. Le rouleau compresseur des marchés financiers et des grands groupes avec en paysage de fond la prise de conscience des salariés et des entreprises, les questions d’impact environnemental sont sous le feu des projecteurs, animés par la création d’institutions ou groupes de réflexions, à l’image du GIEC, de la Convention Citoyenne pour le Climat ou le Haut Conseil pour le Climat créés plus récemment.
Scandée dans les publicités de beaucoup d’entreprises françaises et affichée comme volonté ferme des différents gouvernements pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, la « Green Attitude » trouve cependant ses limites. Rappelons-nous ces slogans « neutralité carbone » brandit comme des étendards par les entreprises. On pouvait davantage y voir un effet de mode, ou se faire une bonne réputation à moindre cout qu’une réelle prise en compte de cet objectif. Et que penser de planter des arbres pour compenser des trajets en avion ? La compensation par l’achat de « crédits carbones » ne permet de réaliser la neutralité que si cette dernière est accompagnée de mesures factuelles de réduction des émissions.
L’ADEME a publié un rapport estimant que le matraquage en règle des entreprises se revendiquant « neutres en carbone » brouillait le message d’origine. Si 85 % des entreprises interrogées cherchent à réduire leurs émissions de CO2, seules 9 % les mesurent de façon précise, et 11 % les ont réduites à hauteur de leurs ambitions ces cinq dernières années.
L’étude révèle d’autres chiffres étonnants. Ainsi, 66 % des entreprises ne déclarent aucune de leurs émissions externes alors qu’elles comptent pour 90 % de la moyenne totale des émissions. Le reporting effectué manuellement à l’aide de simple tableur induit des marges d’erreur de 30 % à 40 %.
Et donc d’après nos dirigeants, il faudrait uniquement produire, en tendant vers des émissions les plus faibles possible, en investissant dans des lignes compensatoires pour brandir une « neutralité carbone ». La prise de conscience et l’attachement de plus en plus prédominants des citoyens, et donc des salariés, les inciteront-ils aussi à être intégrés dans une économie « plus verte ».

Chacun d’entre nous au cœur du changement le souffle syndical

L’échéance impérative de la réduction de nos gaz à effet de serre et de l’exploitation des ressources naturelles, auront pour conséquences d’importants transferts financiers. Notons que plus de 40 % du PIB mondial dépend des services rendus par la nature. Ce changement modifiera notre économie, bouleversera les plus pauvres, qu’ils s’agissent des individus comme des États. Il y a un fort risque de création d’inégalités, une de plus à un moment où notre société subit année après année diverses crises. Notre modèle est à revoir en profondeur face aux défis du changement climatique, d’où l’inquiétude croissante des associations et des experts sur le sujet puisque peu d’objectifs ont été remplis.
Les emplois menacés dans les secteurs à fortes émissions sont souvent localement concentrés dans des zones déjà défavorisées. FO tient à souligner que la légitimité de la transition verte risque de se heurter à des enjeux sociaux d’une ampleur considérable. Elle aura des effets de redistribution massive mais à ce jour, aucune mesure n’est prise pour combattre les impacts négatifs qu’implique ce changement de paradigme.
Réduction de l’impact carbone, égalité salariale, inclusion, juste partage des bénéfices… Les salariés sont plus que jamais attentifs à ce que leur entreprise mène une politique ambitieuse sur les sujets RSE. Selon une récente enquête Harris Interactive, plus de 8 Français sur 10 jugent ces engagements prioritaires.
77 % des personnes interrogées en font même un critère important, voire prioritaire, de choix pour venir travailler dans une entreprise.
Globalement, les Français sont circonspects quant aux promesses d’engagement des entreprises. 75 % d’entre eux estiment que celui-ci est superficiel et relève davantage d’une stratégie marketing que d’une conviction profonde.
Les syndicats doivent insuffler une exigence ferme concernant les trajectoires à prendre, sous réserve d’une transition équitable. Nous ne pouvons nous contenter de potentielles créations d’emplois dans des activités nouvelles. Cette transition verte doit s’accompagner de droits individuels et collectifs, concrets et ambitieux pour relever l’impérieuse épreuve du changement climatique. Ces sujets sont toutefois relégués au second plan dans le dialogue social.
Nos entreprises surfent sur la tendance verte mais révisent-elles suffisamment leurs biens et services pour faire évoluer les modes de consommation pour les rendre plus durables ? Arriveront-elles à assurer une transition juste pour les travailleurs dans le temps imparti ? Les citoyens sont capables de contribuer par ces réflexions et propositions à changer ces modes de développement.
Les gouvernements et entreprises en feront-ils tout autant ?

Sobriété énergétique à La Poste

économie ou écologie ?

On peut s’interroger sur les raisons réelles qui poussent La Poste à présenter ce plan de sobriété énergétique.
Bon, d’accord, c’est le gouvernement qui, par son fameux plan national, vient donner des directives aux entreprises.
Mais il nous paraît de bon aloi de réfléchir à qui profite le crime.

Résumons : La Poste imposera 16° C dans les locaux industriels, 19° C pour les sites tertiaires et 14° C pour les locaux inoccupés pendant 24h à 48h. Elle interdira également les chauffages d’appoint.
Il est évident que l’augmentation des coûts du gaz et de l’électricité, l’instabilité économique due au conflit Russo-Ukrainien poussent à résonner différemment.
Bref, il faut participer à cet « engagement sociétal » comme dit le Président Wahl.

Mais dans les causalités décrites juste au-dessus il n’y aucun argument écologique mais seulement des opportunités économiques. Mais… Attention, il faut toutefois veiller à ce que les conditions de travail des postières et des postiers ne s’en trouvent pas dégradées, risquant des dommages collatéraux sérieux. Prenons par exemple le cas d’une plate-forme Colis, bâtiment de fer et de ciment au plafond très haut. 16° C au sol ! La chaleur monte jusque sous le toit. Quelle sera, du coup, la température au sol ?
En cette peak-période, les agents auront la tête dans le guidon et les pieds dans la glace. Cela pourrait avoir de fâcheuses conséquences sur leur santé ; est-ce que les arrêts ne vont pas se multiplier ?
De ce fait, l’économie réalisée grâce à la baisse du chauffage pourrait être amputée car il faudra remplacer les malades par de l’intérim.

Donc OUI à l’écologie, OUI à l’économie mais pas au détriment des postières et postiers. Le plan de sobriété présenté ne doit pas être une sorte d’économie élastique avec la santé des postiers
en variable d’ajustement.