« Maisons de service au public » : redécouvrir La Poste au nom de la République ?

Le projet de loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République est actuellement en débat à l’Assemblée Nationale.

A cette occasion, la Fédération Force Ouvrière de la communication tient à souligner l’importance de l’article 26 du texte soumis aux députés. Lequel prévoit la création de « Maisons de service au public ».

Malgré l’ambiguïté de la formule – tout service au public n’est pas un service public – FO Com estime qu’il y a là une nouvelle chance de redonner du souffle à une idée conforme aux valeurs républicaines. En effet, elle associe la liberté de résider là où on le souhaite, l’égalité de traitement quel que soit la condition de chacune et de chacun, et enfin, figure de la fraternité, l’indispensable solidarité. Or, jusqu’à présent, la notion de maisons de service public s’est traduite par beaucoup de déclarations d’intentions, d’atermoiements et de réalisations à minima.

Remis sur la sellette par le député Jean Launay dans un récent rapport, le principe de mutualisation s’inspire d’une évidence : le développement démographique de la France rurale et périurbaine ainsi que les besoins sociaux et économiques non satisfaits qui en découlent. Ce principe apparaît aussi comme une façon raisonnable et constructive de résoudre une partie du dilemme dans lequel s’enlisent les pouvoirs publics : à savoir prôner d’un côté l’austérité budgétaire tout en prétendant, de l’autre, revitaliser des territoires dont la population se sent de plus en plus marginalisée, notamment par une déshérence des services publics.

Cette mutualisation, dont les bureaux de postes pourraient être l’épicentre, est d’un ordre à la fois défensif et offensif. Défensif car elle permet de partager, donc de réduire les coûts de fonctionnement tout en maintenant l’emploi. Offensif en ce qu’elle rendrait la vie plus facile aux usagers en leur épargnant des déplacements, grâce à la concentration au plus près de leur domicile, de services administratifs, sociaux et économiques.

Aujourd’hui, et FO le dénonce depuis des années, soit les services publics se sont retirés de pans entiers du territoire, soit ils ne s’y sont jamais implantés. Il est temps de mettre fin à cette inexistence ou à ce repli, synonymes de capitulation et d’abandon. Il se trouve que seule la présence postale, malgré un effacement progressif, conserve encore un maillage de proximité digne de ce nom. Il semble donc naturel que les bureaux de poste deviennent, lorsque cela est possible, des lieux de convergence et de développement des services publics en matière d’information et de prestations de base. Le réseau numérique de La Poste, y compris par le biais des Smartphones des facteurs, devenant aussi un relai privilégié de communication pour tous les opérateurs concernés.

La Fédération FO COM n’ignore pas qu’une idée intéressante peut être viciée par des arrière-pensées et des effets pervers. L’article 26 du projet de loi suscite des équivoques et des interrogations : quels dispositifs juridiques et financiers présideront à cette construction ? Quelle répartition des rôles interviendra entre les instances relevant de l’Etat, celles émanant des collectivités territoriales et des autres opérateurs publics ? Quid du statut des personnels ? Bien d’autres sujets devront être creusés.

Pour FO Com il est impératif que cette initiative, rendue possible par la transformation numérique, ne devienne pas un prétexte pour réduire l’emploi public. Une meilleure répartition et circulation des tâches doit aussi permettre aux échelons des organismes partenaires, aujourd’hui surchargés, de mieux accueillir le public et de traiter plus efficacement les questions les plus complexes. Il va aussi de soi que les activités nouvelles ont pour vocation de compléter et non de perturber l’exercice des missions de service public dévolues aux postières et aux postiers. Sans oublier que les efforts d’adaptation qui leurs ont été demandés ces dernières années et qu’ils ont assumés avec une grande résilience jusqu’à présent risquent de conduire à un point de rupture si on « charge trop la barque ».

Enfin, la mise en place des Maisons de service au public, positive en soi, ne doit pas avoir comme contrepartie la transformation des bureaux de poste les mieux situés en agence bancaire.

Si les maisons de service au public peuvent amener à redécouvrir La Poste sous un angle républicain, la bancarisation outrancière des bureaux de poste les plus importants contredirait cette démarche.

Paris, le 5 mars 2015
Le Secrétaire Général
Jacques DUMANS